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A Montréal, un Retour flamboyant !
« Je n’ai qu’une faiblesse : une faiblesse qui a 65 ans et que je n’ai pas vue depuis 10 ans. » La voix enregistrée qui prononce ces paroles est celle d’un jeune enfant et se fait entendre dans la salle en préambule du spectacle. Ce sont les mots d’un mînot pour décrire une absence, celle d’une maman qui manque terriblement à son garçon devenu adulte, « guerrier » même. Et puis sa voix, réelle cette fois, profonde et grave, enveloppe la salle entière, et Fernando Gallego Torres, alias El Bancalero, traverse les rangées de spectateurs avant de monter sur la scène. Le coup d’envoi de Retour est donné.En plein coeur de Montréal, ce dimanche soir d’hiver, les aficionados québécois ont retrouvé toute la chaleur des tablaos. En petit comité, dans une intimité quasi familiale, El Bancalero et sa talentueuse tribu transmettent un flamenco sincère et pur, sans artifice aucun. Pour évoquer sa maman de Cadix qu’il n’a pas vue depuis une décennie, le cantaor, charismatique silhouette aux cheveux bruns ondulés, choisit un répertoire classique qui a bercé sa jeunesse. Et pour accompagner ses paroles, El Bancalero convie la danseuse Rosanne Dion sur la scène de la Sala Rosa.De farruca en fandango jusqu’à une rumba typique de sa terre natale, ce grand chanteur venu d’Andalousie, carrure de rugbyman, offre aux spectateurs une émotion à fleur de peau. De la tristesse ? Non pas vraiment ; une certaine nostalgie plutôt. Elle est là, palpable et il n’y a qu’a la cueillir, comme si l’artiste, qui dit chanter avec son coeur, se mettait à nu. Avec une guitare pleine de subtilité dans les mains de Caroline Planté, ce Retour ne fait que monter en intensité, exprimant l’impatience d’El Bancalero pour retrouver les bras de sa mère.Exilé en Amérique du Nord, Fernando Gallego Torres a conservé tout le sang flamenco de sa patrie et véhicule par le chant cette mémoire intacte. Superbement servi en duo grâce à complice guitariste, il dévoile une empathie si profonde en chantant Luz en los balcones que la salle toute entière en frissonne. Une beauté absolue. Idem lorsqu’il interprète un fandango de Huelva. Mais la classe et l’intelligence de ce chanteur est aussi de laisser place à la guitare et à la danse. Technique, puissante, énergisante, explosive, Rosanne Dion, danseuse très expressive et fidèle à la tradition de l’école jerezena avec une pointe de modernité, impulse (dans ses tientos comme les soleas) une dimension supplémentaire à un show déjà envoûtant. Le final, où la brune exalte dans une impressionnante série à la bata de cola, encouragée par El Bancalero, Caroline Planté et le discret mais non moins talentueux Miguel Medina aux percussions, offre une jolie fin de fiesta. Une sorte de feux d’artifice, de bouquet final qui démontre, s’il le fallait encore, toute la passion d’une scène flamenca montréalaise en pleine ébullition, tout en restant extrêmement fidèle à la tradition. Un Retour… qui ne demande que d’autres retours !
Agathe Beaudouin
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Fernando Gallego "El Bancalero"
Por Cai
9 décembre
Sala Rosa
Montréal
Photo Hervé Leblay